Corine, Olivier, Viviane, Thalia, Noé et Malika
coopérants au Nicaragua avec E-Changer

25 février 2011

(O) La Fondue et le Nacatamal

La fondue, tout le monde connaît. Le nacatamal, c’est le plat traditionnel du week-end nicaraguayen. Rencontre insolite dans une cuisine. La majorité de nos lecteurs parlant français, le dialogue est traduit dans la langue de Voltaire.
Nacatamal : Holà, ça tombe bien qu’on soit le week-end, parce qu’en dehors de ces jours, il est difficile de me rencontrer.
Fondue : Salut ! Pourquoi, tu es si occupé ?
N : Moi pas, mais les dames qui me confectionnent attendent au minimum 20 convives pour me concocter ; moins, ça laisserait trop de reste. Ce n’est pas ton cas ?
F :Oh moi, il n’y a pas d’heure ni de jour. Ceux qui m’aiment me conservent même au congélateur en cas d’imprévus.
N : De quoi tu es fait donc ?
F : Tiens, tu parles donc comme les puristes ! Ceux qui me préparent en moitié-moitié, moitié Gruyère et moitié Vacherin, qui sont des fromages typiques d’une région de Suisse. Mais partout dans les Alpes on fait de la fondue, de manière un peu différente. Et toi, qu’est-ce qui te compose ?
N : C’est drôle, beaucoup de ces gens qui t’aiment bien ont de la peine avec moi. Et pourtant, tous mes compatriotes leurs vantent mes saveurs. En fait, je me compose d’une farce de riz, légumes, un peu de viande et…des restes de ceci ou cela. Le tout entouré d’une pâte de maïs, et, pour finir, enveloppé dans une feuille de bananier et cuit dans l’eau chaude. Ca prend du temps et l’utilisation des restes donne beaucoup de volume.
F :Un plat de pauvre quoi ?
N :Pauvre je ne sais pas.Mais ceux qui me mangent sont repus, et ainsi rien n’est perdu. Il arrive que la dame qui me confectionne me mettent en vente, mais s’il n’y a pas l’assurance de nourrir vingt personnes, on ne me fabrique carrément pas. Et toi, vu ta manière de me considérer, tu dois sans doute valoir beaucoup.
F : Difficile à dire. Je ne pense pas qu’on s’adresse aux mêmes consommateurs. Mais d’une certaine manière, on se ressemble pour la convivialité : toi tu n’existe que pour un grand nombre, moi, il faut être au minimum deux, et pour bien, pas plus de six autour du caquelon qui me contient. Ensuite, une fois que j’ai fondu à petit feu avec un peu de vin blanc et de l’ail, les convives munis de longues fourchettes à deux dents y plantent un morceau de pain et le font tremper jusqu’à ce que je m’enrobe autour du pain. Attention à celui qui perd son pain dans ma masse, il a un gage.
N : C’est un jeu ou un repas ?
F : Ah non, surtout pas. Je représente une coutume de mon pays, on ne plaisante pas avec moi !
N :Les gens de mon pays quand ils voient de la nourriture, ils la consomment. Comme ils ne savent pas de quoi sera fait leur lendemain, ils profitent de s’alimenter quand il y a. C’est pourquoi l’idée de gage autour d’un repas m’interpelle.
F : J’imagine, vois-tu, qu’en des temps anciens, lorsque mes consommateurs vivaient dans des conditions plus précaires, ils ont du inventer ce genre de règles pour éviter toute forme de perte. Maintenant que ces valeurs ont fait leurs pays, ils les maintiennent comme rappel de l’origine de leur prospérité. Je pourrais me prétendre le symbole de mon pays à travers ma capacité à me mélanger à d’autres ingrédients.
N : Je pense que moi aussi je représente le mien, surtout dans l’idée que je ne rejette rien, tout peut contribuer à m’améliorer et à me donner plus de richesse. Comme toi donc, tu n’es fait que de fromage mais n’importe quel fromage fait l’affaire pour ta saveur.
F :Comment ? Tu ne penses pas que je vais me mélanger avec n’importe quoi ? C’est plus compliqué, plus élaboré, plus subtil. Comme mon pays, tout s’est constitué de mélanges plus ou moins harmonieux. Maintenant que l’impression d’équilibre est trouvé, il est très difficile de tenter de nouveaux mélanges.
N : Un jour peut-être qu’on considérera ma pureté en fonction de la manière de me consommer. Mais pour ma part, je peut dire que mon aspect symbolique réside dans le fait qu’ici, en général, on considère que tout est mélangeable et que tout peut être bon. Le problème, je crois, c’est que, parfois, on m’y ajoute des éléments qui gâtent la saveur de l’ensemble.
F : C’est un plaisir de parler avec toi, mais je chauffe et on m’attend. Ce sera avec plaisir que je poursuivrai cette petite conversation avec toi. Adjeu, donc !
N : Dale pues ! Pour moi aussi, je dois continuer à mijoter encore un moment et je m’amuserai, pour peu que des gens de ton pays me déguste, à les voir se brûler les doigts en me déshabillant.

13 février 2011

(C) Il y a un an...

Il y a un an, nous traversions le grand bleu. Il y a un an, nous nous installions dans ce petit coin de montagnes nicaraguayennes qui est devenu notre chez nous. Il y a un an, nous entrions tout doucement dans cette communauté jinotegana qui nous a accueilli si chaleureusement. Il y a un an, nous changions de vie. Il y a un an...
Il y a un an nous partions à la découverte d'un pays que nous ne connaissions pas. Il y a un an, nous nous engagions dans une action qui allait changer notre vision du monde, du quotidien. Il y a un an, nous bouleversions tous les repères de nos enfants, nous les trimballions dans nos bagages, au fil des avions, des kilomètres en bus et du décalage horaire. Il y a un an, nous atterrissions à Managua, un peu groggys, un peu anxieux, très fatigués. Il y a un an, ...
Il y a un an, nous commencions à travailler pleins d'idées, pleins de projets, pleins d'envie de faire. Il y a un an, nous commencions à désapprendre. Il y a un an, ...
Un an après, nous continuons à apprendre, humainement bien sûr, mais professionnellement aussi. Un an après, nous nous réveillons comme si nous étions arrivés avant-hier...
Et dans un an?

(C) «Nous voulons, de nos yeux, voir un autre monde, nous voulons voir le monde avec des yeux neufs» (enjeux du FSM 2011)

Credit S. Ferrari
La semaine dernière se tenait le Forum Social Mondial  à Dakar. De nombreux articles des différents délégués suisses présents au Sénégal, de la part des acteurs les plus importants et des dossiers retraçant ce  qui est devenu, au fil des années, un rendez-vous incontournable, se trouvent actuellement sur le site de E-Changer et du  Forum Social Mondial.  Pour mieux comprendre, pour que, disait un certain Jacques Sens, "découvrir soit un art qu'il ne faut jamais négliger".